L’EVERESTING CHALLENGE : le défi solidaire de DOMINIQUE

Le 24 juin dernier, Dominique s’est élancé pour son défi solidaire, l’EVERESTING CHALLENGE. L’objectif : gravir dix-neuf fois d’affilée le col de Macuègne (1 068 mètres) à Montbrun-les-Bains, dans le Sud-Drôme, pour atteindre l’équivalent des 8 849 mètres de l’Everest.

À cette occasion, Dominique avait lancé une collecte de fonds en soutien à notre association qui lui a permis de nous remettre 5 000 euros pour nous aider à renforcer nos actions.

Un grand Merci à DOMINIQUE pour cette incroyable mobilisation, ainsi qu’a tous ceux qui l’ont soutenu et accompagné.

« Je n’ai pas atteint l’Everest, mais j’ai dépassé de loin le Kilimandjaro… »

Découvrez son témoignage sur cette belle aventure solidaire  :

 » Juin 2021 je suis dans la Drome Provençale,

Montée des Perrières col de Macuègne.

Pour me mettre « en jambes », je fais deux ascensions du Ventoux, une par Malaucène, l’autre par Sault le jour suivant.

Je constate alors que les conditions de sécurité ne sont pas optimales, je décide de changer d’itinéraire et de réaliser mon défi au col de Macuègne moins prestigieux, mais la difficulté reste la même, dix-neuf montées seront nécessaires pour atteindre l’EVEREST.

J’établis mon camp de base au gîte à Monbrun à quelques centaines de mètres au pied du col. J’ai soin de nommer sur des petits cartons, chaque montée, du prénom des personnes qui me sont chères pour n’en oublier aucune.

Le départ est fixé à 21 h. La première ascension est une simple formalité qui se fait dans la joie et l’allégresse. J’arrive au sommet, la nuit tombe déjà, avec une heure d’avance par rapport à la Bretagne. La lune pointe son nez de derrière une colline, comme si nous avions rendez-vous. La température baisse très vite, me voilà dans le bain il va falloir gérer.

Rouler dans la pénombre rend la perception de l’environnement bien étrange. Je dois m’acclimater aux bruits nocturnes et aux paysages restreints que dessine ma lampe, ce qui m’oblige à prendre des repaires sonores ou visuels, pour mieux me situer dans ce décor, je suis dans une autre dimension. Ici coule une source, là c’est le monument en souvenir de martyrs de la résistance, puis j’aperçois les lacets en épingles du village de Barret-de-Lioure, juste après la petite fontaine, où coule une eau rafraîchissante et potable qui me rassure et me permettra de me ravitailler.

Les montées s’enchaînent et se ressemblent, je les franchies sans aucune difficulté, je me rapproche du but que je me suis fixé. Je commence à connaître ce col par cœur. Non, je ne suis pas seul, tous mes amis, ma famille m’accompagnent par la pensée. Je leurs parle tout le long du chemin. Sentir leurs présences, leurs encouragements, ça me rassure, car la nuit est inquiétante. Le décor se déplace et s’efface derrière moi, tous mes sens sont en éveil. Je me souviens des cours de mon professeur de chant. Je me mets à chanter un air des pêcheurs de Perles, « Je crois entendre encore, caché sous les palmiers ». Je reste cependant très concentré sur ma course mais fournir des efforts n’empêche pas de penser, mon cerveau s’évade, mon esprit divague.

Les animaux sauvages que je dérange, un peu comme cette chouette que j’effraie, semblent s’étonner de cette intrusion et finissent par comprendre que le couvre-feu des humains est hélas levé.

Il y a aussi des moments de silence, presque de recueillement ou je me remets en question, pourquoi et pour qui suis-je ici, la raison me revient, c’est pour Margo et pour les enfants.

En relevant la tête, j’aperçois dans les hauteurs des feux de positions, c’est mon fidèle sherpa, « mon vieux glaude », celui qui m’accompagne et qui attend là-haut sur une aire de stationnement, au froid, il fait à peine huit degrés. Il me demande à chaque passage si ça va, si je vais continuer. Il me connaît, c’est mon frangin, celui qui ne dit jamais non, sans lui, rien n’est possible. Il sait que je suis têtu, que je suis dans ma bulle, rien ni personne ne me fera renoncer, alors il patiente, il m’encourage.

Monter, descendre et puis recommencer. Je suis étonné de ma forme. Le jour se lève, il est cinq heures et même si Paris s’éveille je n’ai pas sommeil. La nuit fait peu à peu place au jour, les paysages se colorent, le soleil a rendez-vous avec la lune, la lune est là, et le soleil ne la voit pas…. Je passe à nouveau par le vieux village de Barret-de-Lioure accroché à la montagne. Il surplombe la vallée et ses pics rocheux, au milieu des prés et des champs de lavande, avec en toile de fond, toute la chaîne du Massif du Ventoux. Mon esprit est rempli de chansons Françaises que je fredonne, les paroles quelques fois oubliées ou modifiées, au gré de mes humeurs je les chante, « c’est comme dans un vieux Rock and Roll j’ai dans ma tête un transistor qui fredonne » c’est ma technique pour rester lucide.

Je décide de prendre une petite pause-café croissant, puis j’entreprends la dixième montée.

Onze heures du matin, j’ai rendez-vous au sommet du col avec un journaliste du Dauphiné Libéré. Mon histoire l’intéresse, il veut m’interviewer. Il est là, ponctuel. Je roule vers lui accompagné de Marie qui décide de faire trois montées avec moi. Courageuse et fidèle compagne Marie. C’est un jeune qui s’avance vers moi, « je me pose des questions sur les questions qu’il va me poser », il a l’air sympa et moi j’ai l’air un peu hagard. Silence ça tourne. « Bonjour Dominique, parlez-moi de votre défi ». Quelques mots pour expliquer pourquoi un type de presque 70 piges s’amuse à se faire mal sur un vélo et me voilà reparti pour une descente presque reposante et entamer une nouvelle ascension, la onzième et douzième « grimpette ».

Cette fois nous sommes trois. Mon fidèle sherpa qui a pris son Vtt et Marie qui m’accompagne une fois de plus avec un peu d’assistance, mais il faudra quand même pédaler.

13 h 30 une pause s’impose. Ça fait prêt de 15 heures que je roule, j’ai besoin de petits plaisirs simples comme un bon plat de nouilles. Retour au camp de base pour engloutir un plat de spaghetti bolognaise. Les barres énergétiques, les gels et les bananes ne constituent pas un repas, c’est simplement pour tenir le coup.

Je rempli à nouveau mes « gourdasses », et me voilà reparti pour une nouvelle escalade mais là sous un soleil de plomb, pas d’ombre, pas de vent, une chaleur caniculaire. Claude qui m’accompagne, commence à se dire qu’on serait mieux à la piscine plutôt que faire le C…

Trois montées sous cette chaleur insoutenable, faut être barge. Ouf ! le point d’eau est en vue, nos bidons sont presque vides, la source nous permet de nous ressourcer. Sans se parler, tels des automates nous refaisons le plein.

Il est 18 heures, la chaleur diminue un peu, l’ombre des arbres nous protège des rayons ardents du soleil. Une nouvelle descente et on repart pour la quinzième ascension. Le jour décline, il reste encore du chemin à faire. J’ai pris du retard sur mon planning, mais j’y crois encore. Retour au camp de base, Je décide de faire une micro pause et de me restaurer un peu. La nuit est impitoyable. Cette fois je sais qu’elle ne me laissera aucun répit. Les jambes tournent bien mais je commence à ressentir le manque de sommeil, il me faudrait un bon massage ou peut être un bain avec du sel d’Epson. J’aurais dû réaliser mon défi dans une baignoire me dis-je en rigolant. Je m’équipe avec des vêtements chauds.

Je sens que je tire un trop gros braquet, que je monte trop en force au lieu de mouliner surtout dans les pourcentages plus élevés. Je change donc de monture espérant qu’un « cheval plus frais » me permettra d’aller au bout. Il est équipé d’un 32 /34 contre un 34/28 ; La scelle est dure et la position demande quelques réglages mais je n’ai pas le temps de finasser. Les jambes tournent mieux c’est le principal. Marie souhaite m’accompagner mais son vélo n’est pas équipé pour rouler de nuit. Le faisceau de ma lampe que j’ai pris soin de recharger semble suffire pour deux. C’est difficile de repartir même après une courte pause, mais ça va, j’ai toujours la forme, du moins c’est ce que je crois. Marie est à mes côtés, à droite pour profiter de ma lumière mais d’un coup elle disparait dans le noir, comme si elle était gommée, réapparait et disparait à nouveau. Ça devient dangereux, elle décide de remonter dans le fourgon qui nous suit sur quelques kilomètres. Nous croisons les gendarmes qui vérifient si je suis bien équipé d’un feu arrière, pas trop surpris de voir un cycliste Breton pédaler à cette heure.

Je ne veux rien lâcher mais je m’aperçois très vite que j’invente des virages alors que la route est droite, plusieurs fois je franchi la ligne blanche, je me suis promis de ne pas franchir la ligne rouge et mettre ma vie en danger. Ce n’est pas le bas du corps qui défaille, c’est le haut, les bras ne tiennent plus le guidon. Je zigzague, je me ressaisi pour terminer cette montée que je trouve plus longue, je ne sens plus mon dos, ni mes épaules, mais je tiens encore debout.

Quand la tête dit oui et que le corps dit non c’est la raison qui l’emporte. Je suis en haut du col, il en reste trois à faire. Mon sherpa et Marie attendent ma décision au sommet, tous deux sont aussi fatigués, par manque de sommeil. Nos regards se croisent, on comprend ensemble que c’est terminé, une nouvelle nuit sans dormir après plus de vingt-quatre heures, c’est un combat perdu d’avance.
L’aventure s’arrête là après 16 montées sur 19, 309 km, 7383 mètres de d+ 23 heures de selle. Je n’ai pas atteint l’Everest mais j’ai dépassé de loin le Kilimandjaro…

Je rêvais de « m’approcher des étoiles », je les ai vu briller dans les yeux de ceux qui m’ont accompagné dans cette Folie. J’étais comme un enfant sur le manège voulant attraper le pompon et qui le touche juste du bout des doigts.

J’analyserai plus tard ce qui n’a pas fonctionné, maintenant j’ai besoin de récupérer.«